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Stop au cancer

Anne la Châtelaine, par Vialleton Jessie

4 Novembre 2012 , Rédigé par Hervé TISSIER Publié dans #Cancer cause principale mortalité, #ipagination écriture solidaire

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Nous partons en balade dans un parc, ou la nature offre ce quelle à de plus beau, en contrastant les couleurs de l'automne. Nous ne sommes pas seuls ! Nous sommes avec Princesse Méline, sa maman et une drôle de châtelaine. Comme ça, on dirait presque à un conte de fées. Pourtant ce n'est pas le cas ! Mais ceux qui ont l'habitude de venir sur stop au cancer connaissent bien le principe des textes d'Auteurs dédié à stop au cancer...


Merci à Jessie pour son soutien !
 

j'en profite également pour donner un hommage appuyé à tous ceux qui se battent pour que les petits bouts de choux malades puissent continuer à rêver, rire, sourire enfin juste arriver à être heureux malgré leurs maux.

Anne la Châtelaine, par Vialleton Jessie
 

Je vous propose aussi de découvrir le blog de Marabout de Ficelle Association loi 1901 contre la tumeur Rhabdoïde et les cancers rares chez l’enfant.

 

Bonne lecture !

 

Anne La Châtelaine

Anne, elle s’appelait Anne. Du moins, c’est ainsi que Méline l’avait surnommée en souvenir d’une héroïne de l’un de ses albums préférés. Nous n’avons jamais su son prénom, elle ne nous l’avait jamais dit.
Nous avions l’habitude de sortir de cette chambre d’hôpital, château fort de ma princesse Méline, princesse le jour, chevalier la nuit, pour aller nous promener dans les jardins ornés de lierres recouvrant les ruines, de fleurs de saison multicolores et d’arbustes épineux taillés en des formes amusantes. Sans oublier l’immense verger bordé de plantes aromatiques et de topinambours gigantesques. Je conduisais son petit fauteuil au milieu de ces grands espaces verdoyants où se perdaient les mares aux canards, l’enclos aux chevrettes, et l’enclos de Janon, la jument mouchetée qu’enfourchait Méline les nuits pour vivre ses folles aventures.
Après de multiples escarmouches entre Méline et la maladie, de multiples provocations de ce foutu cancer auxquelles elle avait fait face si courageusement, nous vivions le dernier combat, celui où, l’intolérable fut annoncé, la victoire de la maladie sur ma fille. Combien de temps restait t-il ? Personne ne pouvait le dire, une éternité si vous me l’aviez demandé à ce moment là, comment imaginer son départ ? « Il vous faut désormais l’accompagner » avaient dit les médecins. Que veut dire accompagner ? Que faut-il faire au juste pour « accompagner » une enfant de 5 ans à peine ? Je crois que c’est Anne qui avait la meilleure réponse à cette question.
Nous l’avions rencontré de manière totalement incongrue à l’automne, au moment où les topinambours offrent leurs jaunes éclatant à nos yeux écarquillés, contrastant avec les ocres de la terre argileuse de la région. Nous ne l’avions jamais croisée avant ce fameux mercredi d’octobre. Une affreuse sensation me taraudait depuis quelques minutes dans le parc. Au gré de notre cheminement sur les pavés du jardin, je sentais comme une présence derrière mois. Je ne dormais pas beaucoup à ce moment là, et mon imaginaire arrivait à me jouer des tours. Mais même en contournant les bosquets, en virevoltant entre les arbres roussis, je n’arrivais pas à me débarrasser de cette étrange impression. Et puis j’avais fini par l’apercevoir, dans son magnifique robe de châtelaine noire et rouge en velours, sa coiffe auquel était suspendu un voile ample rouge, ses gants blanc immaculés et son nez rouge de clown. Un doigt sur la bouche, elle m’avait indiquée qu’il ne fallait pas la faire remarquer, et elle m’avait montré Méline du doigt. Elle avait secoué une branche pour la faire bruisser, et s’était cachée derrière le bosquet. La séance de cache-cache avait duré une dizaine de minutes pendant lesquelles Méline se contorsionnait tant bien que mal pour découvrir ce qui semblait lui tourner autour. Jusqu’à ce qu’Anne fasse son apparition devant le fauteuil, stoïque, solennelle, avant de faire une magnifique révérence. Elle avait offert une fleur de topinambour à Méline et s’était éclipsé comme à son habitude. Depuis ce jour, Méline trépignait chaque mercredi avant de partir à la recherche de la châtelaine aux jardins.
Anne était un mime suiveur. Elle s’était installée dans le parc de l’ancien château à côté de l’hôpital, et s’y produisait les mercredis et les weekends. Je ne saurais l’affirmer, mais j’ai la sensation qu’elle s’était prise d’une affection toute particulière pour ma princesse. Je me sentais étrangement bien avec elle, peut être parce qu’elle ne parlait pas. Nous n’avions échangé que des regards, pendant plusieurs mois, aucun mot inutile. Elle n’avait jamais entendu que Méline était condamnée, mais je crois qu’elle le savait malgré tout. L’avait-elle déchiffré dans mes yeux ?
Quoiqu’il en soit, Anne préparait nos rencontres avec beaucoup d’attention. Dans ses pantomimes, elle nous offrait toujours des histoires spectaculaires en musique. Elle avait même adopté Eleonor, la girafe au coup cassé. Cette girafe avait l’art de faire rire aux éclats n’importe quel passant. Jusqu’au jour où Eleonor s’était perdu dans le parc. Nous étions parties pour une grande chasse à la girafe. Méline l’avait retrouvée in extrémiste devant l’ancien presbytère avant que la nausée l’a prenne et que nous ayons du remonter dans la chambre. Une petite infection intestinale qui avait bien failli lui coûté ce cadeau inestimable, Eleonor la Girafe.
Nous avions notre « Dame Rose » personnelle, sans dieu ni catch. Juste une magnifique Dame Rouge à la parole impossible.
Un après midi de novembre, la pluie avait balayée les bordures du parc, et l’argile ruisselait sur les pavés le long du chemin. La châtelaine s’était installée contre la plus haute paroi des ruines du château avec tout son barda. Des scieurs-de-long s’afféraient juste à côté à scier pour la rénovation de la face est du château reconnu patrimoine depuis peu. Elle avait sauté sur l’occasion pour mimer une scène hilarante avec une nouvelle girafe. Elle avait confectionné un petit cercueil en papier mâché, et mettait en scène sa girafe hypocondriaque qui courbait le cou pour réussir à rentrer dans son cercueil, en prévision de sa future crise cardiaque. Méline avait adorée. Et quand la Dame Rouge s’était mise à imaginer la taille de girafe qu’aurait celle qui rentrerait dans un cercueil de la taille du tronc scié sur l’échafaud, je n’avais moi-même pu m’empêcher de m’esclaffer.
Nous avions fini l’après midi sous le soleil, et Méline avait insisté pour qu’elle puisse être allongée sur une couverture dans l’herbe humide juste le temps de compter quelques nuages avant de remonter se mettre au sec.
Anne nous prodiguait vraiment une cure de bien faits à chaque rencontre, et nous avions gravi les marches de cette terrible épreuve avec des rêves pleins la tête, et des fous rires inespérés.
Aujourd’hui je sais que je n’oublierai jamais ces échos de bonheur sous le soleil d’automne, et ces images d’elle aux reflets de purpurine et de verts éclatants.

 

 

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J
<br /> Merci Hervé pour cette publication, et pour ton soutien à Marabout de Ficelle. C'est en marchant main dans la main que la recherche avance et que la maladie est repoussée dans ses retranchements.<br /> Un réel plaisir de lutter à tes côtés.<br /> <br /> <br />  <br />
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